Un parcours sonore et urbain à la découverte du patrimoine de Billancourt
Au fil des siècles, la ville de Boulogne-Billancourt a changé de visage. Les mutations urbaines et architecturales se sont succédées, une industrie laissant place à une autre. Les strates successives de la ville (ferme monastique, villas du XVIIIe siècle, construction et démolitions des hangars industriels par Louis Renault, transformations des années 2000, etc.) ont façonné la ville et continuent de la façonner aujourd’hui, notamment avec le nouvel écoquartier du Trapèze. Si l’ensemble des usines est démoli à partir de 2004, il reste aujourd’hui quelques traces matérielles et une mémoire vive.
Le Métal 57, appelé autrefois 57 Métal, est un témoin du patrimoine industriel de la fin du XXe siècle. Le chiffre 57 correspond à l’emplacement du Département Usinage (département 57) de l’entreprise Renault. Ce bâtiment est conçu par l’architecte Claude Vasconi en 1984 qui souhaite y réinterpréter la forme des sheds – toits en dents de scies dont les vitrages tournés vers le Nord permettent de diffuser une lumière constante, été comme hiver, matin comme soir – des anciens ateliers industriels. L’architecte reçoit une distinction pour cet ouvrage architectural (l’Equerre d’argent) et La Poste édite même un timbre à l’effigie du bâtiment.
Ce bâtiment doit initialement s’inscrire dans le grand projet de modernisation « Billancourt 2000 », un projet qui n’aboutira pas. En 2010, le ministère de la Culture et le Maire de Boulogne-Billancourt s’opposent à sa démolition. Une question se pose alors : pourquoi est-ce si important de garder trace ? Cette question en implique d’autres : que doit-on garder ? Que peut-on conserver ? Quelles traces architecturales, urbaines, paysagères souhaite-t-on transmettre aux futures générations ? À partir de quel moment parle-t-on de patrimoine ? Qu’est-ce que le patrimoine contemporain ? Et aujourd’hui, en regardant autour de nous, pouvons-nous identifier ce qui fera patrimoine… demain ?
Si les traces matérielles des différentes industries sont aujourd’hui peu nombreuses, le patrimoine immatériel représente une grande richesse pour comprendre la ville et ses changements. Aussi, dès 1984, le Comité d’Entreprise Renault, conscient que la fin du site Billancourt approche, fait appel au compositeur Nicolas Frize pour enregistrer la mémoire sonore de l’entreprise. Ce dernier propose 900 enregistrements des sons de l’usine qui seront la matière première de sa création musicale « Paroles de voitures ».
Par la suite, de nombreux artistes et chercheurs ont travaillé avec ces mémoires humaines pour engager un travail de reconnaissance. Aussi, en 1999, c’est le photographe Yann Maury-Robin qui immortalise les visages d’anciens de Renault et les usines désaffectées.
Bien que la fermeture des usines Renault Billancourt soit la fin d’un chapitre pour l’entreprise, les anciens salariés ont, quant à eux, le souhait de faire connaître l’histoire de ce qu’ils ont vécu, vu et expérimenté. Voilà comment sont nées les associations ATRIS (Association des anciens travailleurs de Renault-Billancourt de l’Île Seguin) et AMETIS (Association de la maîtrise, de l’encadrement et des techniciens de l’Île Seguin) : avec l’envie de se retrouver d’abord, et de transmettre ensuite. Parce que leurs voix portent l’histoire de Renault mais résonnent bien au-delà.